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passe vers le milieu du seizième siècle, époque où vivaient réellement la plupart des personnages introduits dans cet ouvrage, et l’action dure trois nuits et trois jours.


INTRODUCTION.

Le chemin était long, le vent était froid, le ménestrel était vieux et infirme. Son visage flétri et ses cheveux blancs semblaient avoir connu des jours plus heureux. Sa harpe, seul plaisir qui lui restât, était portée par un enfant orphelin. Il était le dernier de tous les bardes qui avaient chanté les chevaliers des frontières[1] ; car, hélas ! leur temps était passé : ses frères, fils de l’harmonie, n’existaient plus, et lui-même, dédaigné, opprimé, il désirait partager leur repos dans la tombe. On. ne le voyait plus guider un noble coursier, et chanter gaiement comme l’alouette au point du jour ; il n’était plus fêté ni recherché par les châtelains et les châtelaines ; on ne le faisait plus asseoir à la place d’honneur pour entendre le lai qu’il improvisait sur sa harpe : les vieux temps et les vieilles mœurs n’étaient plus. Un étranger occupait le trône des Stuarts ; l’art innocent du barde était un crime aux yeux des fanatiques de ce siècle de fer. Pauvre, humilié, errant, il mendiait son pain de porte en porte, et accordait pour l’oreille d’un paysan la harpe qu’un roi avait aimé jadis à entendre.

Le ménestrel passait près de l’endroit où la tour majestueuse de Newark s’élève au-dessus des bouleaux de l’Yarrow ; son regard s’y porta avec l’expression du désir ; il ne voyait pas dans les environs un autre asile plus humble. Enfin, d’un pas craintif, il franchit le seuil de cette pesante porte de fer de laquelle étaient si souvent sorties des légions de combattans, mais qui ne s’était jamais fer-

  1. Border. — En.