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De trop donner à Dieu, de trop compter sur lui.
Quel espoir ! Quel honneur de l'avoir pour appui !
Laissons, laissons tout faire à celui qui nous aime.
Il sait mes intérêts beaucoup mieux que moi-même.
Contre lui pour nos droits nous disputons en vain,
Trop heureux de pouvoir les remettre en sa main.
Eh ! Comment résister à cette main puissante ?
La molle et souple argile est moins obéissante,
Moins docile au potier qui la tourne à son gré,
Qu'un cœur au souffle heureux dont il est pénétré.
Oui, c'est de ta bonté que je dois tout attendre,
J'en dépends : mais, seigneur, ma gloire est d'en dépendre ;
Tu me menes, je vais ; tu parles, j'obéis ;
Tu te caches, je meurs ; tu parois, je revis.
A moi-même livré, conduit par mon caprice
Je m'égare en aveugle, et cours au précipice.
Mes vices que je hais, je les tiens tous de moi ;
Ce que j'ai de vertu, je l'ai reçû de toi.
De mes égaremens moi seul je suis coupable :
De mes heureux retours je te suis redevable.
Les crimes que j'ai faits tu me les a remis ;
Et je te dois tous ceux que je n'ai point commis.
Qu'une telle doctrine est douce et consolante !
Elle remet la paix dans mon ame tremblante.
La foi m'apprend d'abord à tout craindre de moi :
L'espérance bientôt vient ranimer ma foi.
« Par vos foibles efforts, il est vrai, me dit-elle,
Vous ne suivrez jamais la voix qui vous appelle.
De cruels ennemis, hélas ! Environné
Vous êtes à leurs traits sans cesse abandonné.