Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/46

Cette page n’a pas encore été corrigée

Les prophètes en vain annonçoient leurs oracles,
Supplioient, menaçoient, prodiguoient les miracles.
Ce peuple dont un voile obscurcissoit les yeux,
Murmurateur, volage, amateur des faux dieux,
A ses prophètes sourd, à ses rois infidelle,
Porta toujours un cœur incirconcis, rebelle.
Dans son temple, il est vrai, l’encens se consumoit ;
Le sang des animaux à toute heure fumoit.
Vain encens, vœux perdus ! Les taureaux, les genisses
Etoient pour les péchés d’impuissans sacrifices.
Dieu rejettant l’autel et le prêtre odieux,
Attendoit une hostie agréable à ses yeux :
Il falloit que la loi sur la pierre tracée
Fût par une autre loi dans les cœurs remplacée.
Il falloit que sur lui détournant tous les coups,
Le fils vînt se jetter entre son pere et nous.
Sans lui nous périssions. Qu’une telle victime
Oblige le coupable à juger de son crime.
Quel énorme forfait, qui pour être expié,
Demandoit tout le sang d’un dieu sacrifié !
Oui, l’homme après sa chûte, au voyageur semblable,
Qu’attaqua des voleurs la rage impitoyable,
Percé de coups, laissé pour mort sur le chemin,
Et baigné dans son sang n’attendoit que sa fin.
Les prêtres de la loi, témoins de sa misere,
Ne lui pouvoient offrir une main salutaire.
Enfin dans nos malheurs un dieu nous secourut :
Le ciel fondit en pluie, et le juste parut.
O filles de Sion, tréssaillez d’allégresse :
Du roi qui vient à vous célébrez la tendresse :