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La terre dans son sein resserre ses trésors :
Il faut les arracher ; il faut par nos efforts
Lui ravir de ses biens la pénible récolte.
Contre son souverain l’animal se révolte :
Le maître de la terre appréhende les vers :
L’insecte se fait craindre au roi de l’univers.
L’homme à la femme uni met au jour des coupables,
D’un pere malheureux héritiers déplorables.
Aux solides avis l’enfant toujours rétif,
Par la seule menace y devient attentif.
De l’âge et des leçons sa raison secondée,
A peine du vrai Dieu lui retrace l’idée.
Hélas ! à ces malheurs, par sa femme séduit
Adam, le foible Adam, avec nous s’est réduit.
Son crime fut le nôtre, et le pere infidelle
Rendit toute sa race à jamais criminelle.
Ainsi le tronc qui meurt voit mourir ses rameaux,
Et la source infectée infecte ses ruisseaux.
L’homme depuis ce jour n’apporte à sa naissance
Que la pente au peché, l’erreur et l’ignorance.
Par l’amour des faux biens il remplit dans son cœur
Le vuide qu’y laissa l’amour du créateur :
Dans son funeste sort d’autant plus déplorable,
Qu’il ignore le poids du fardeau qui l’accable ;
Qu’il se plaît dans ses maux, et fuit la guérison ;
Qu’il aime ses liens, et chérit sa prison.
A le voir, pourroit-on croire son origine !
Est-ce là, direz-vous, cette image divine ?
Sans doute. Le portrait n’est pas tout effacé ;
Quelque coup de pinceau demeure encore tracé.