Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/195

Cette page n’a pas encore été corrigée

Que prétend Attila ? Que demande Alaric ?
Où s’emporte Odoacre ? Où vole Genseric ?
Ils sont, sans le savoir, armés pour la querelle
D’un maître qui du Nord tour à tour les appelle.
Devant leurs bataillons il fait marcher l’horreur :
Rome antique est livrée au barbare en fureur :
De sa cendre renaît une ville plus belle,
Et tout sera soumis à la Rome nouvelle.
Je la vois cette Rome, où d’augustes vieillards,
Héritiers d’un apôtre, et vainqueurs des Césars,
Souverains sans armée, et conquérants sans guerre,
A leur triple couronne ont asservi la terre.
Le fer n’est pas l’appui de leurs vastes états ;
Leur trône n’est jamais entouré de soldats.
Terrible par ses clefs, et son glaive invisible,
Tranquillement assis dans un palais paisible,
Par l’anneau d’un pêcheur autorisant ses lois,
Au rang de ses enfants un prêtre met nos rois.
Ils en ont le respect, et l’humble caractère.
Qu’il ait toujours pour eux des entrailles de père !
D’une religion si prompte en ses progrès
Si j’osais jusqu’à nous compter tous les succès,
Peindre les souverains humiliant leur tête,
Et la suivre partout de conquête en conquête ;
Quel champ je m’ouvrirais ! Quel récit glorieux !
Mais que pourrais-je apprendre à quiconque a des yeux ?
L’arbre couvre la terre, et ses branches s’étendent
Partout où du soleil les rayons se répandent.
De l’aurore au couchant on adore aujourd’hui
Celui qui de sa croix attira tout à lui.