Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/187

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et le calice amer qu’on lui doit présenter,
Loin de lui, s’il pouvait, il voudrait l’écarter.
Est-il donc d’un héros d’écouter la nature ?
Socrate en étouffa jusqu’au moindre murmure.
L’imposture, féconde en discours séduisants,
Eût orné son récit de charmes plus puissants.
Leurs écrits, dites-vous, dépouillés d’artifice,
Ne font point dans leur cœur soupçonner de malice ;
Mais peut-être on les trompe, et séduits les premiers,
Ils ont crû follement des mensonges grossiers.
Si tous ces faits sont faux, ont-ils pu les écrire
Parmi des ennemis prêts à les contredire ?
A peine aux yeux mortels leur maître est disparu :
A toute heure, en tout lieu, tout un peuple l’a vu
Qu’elle a d’autorité l’histoire, qu’en silence
Sont contraints d’écouter des témoins qu’elle offense !
Mais en quel triste état te découvrent mes yeux,
Ville jadis si belle, ô peuple ami des cieux !
Qu’as-tu fait à ton Dieu ? Sa vengeance est certaine.
Comment à tant d’amour succède tant de haine ?
Son bras de jour en jour s’appesantit sur toi,
Et tu ne fus jamais plus zélé pour sa loi.