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son héros s’apprête :
la rage des méchants doit fondre sur sa tête.
S’il se montre à la terre, à la terre arraché,
Proscrit, frappé, sanglant, à la croix attaché,
Paix secrète du cœur, gage de l’innocence,
C’est toi seule à sa mort qui seras sa défense.
L’oracle est accompli. Le juste est immolé.
Tout s’émeut, et des bords du Jourdain désolé
Au Tibre en un moment le bruit s’en fait entendre.
D’intrépides humains courent pour le répandre :
Ils volent : l’univers est rempli de leur voix.
Repentez-vous, pleurez, et montez à sa croix,
Quel que soit le forfait, la victime l’expie.
Vous avez fait mourir le maître de la vie.
Celui que vos bourreaux traînaient en criminel,
Est l’image, l’éclat, le fils de l’éternel.
Ce Dieu dont la parole enfanta la lumière,
Couché dans un tombeau dormait dans la poussière ;
Mais la mort est vaincue, et l’enfer dépouillé.
La nature a frémi, son Dieu s’est réveillé.
Il vit, nos yeux l’ont vu. Croyez. Parole étrange !
Ils commandent de croire : on les croit, et tout change.
Simples dans leurs discours, simples dans leurs écrits,
Les accusera-t-on d’éblouir nos esprits ?
Ils comptent leurs erreurs, leur honte, leur faiblesse.
Par eux, de leur naissance apprenant la bassesse,
J’apprends aussi par eux leur infidélité,
Le trouble de leur maître, et sa timidité.
A l’aspect de la mort il s’attriste, il frissonne :
Languissant, prosterné, la force l’abandonne,