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Laissons la toutefois s’égarer dans sa course,
Et de la vérité suivons toujours la source.
La terre sort des eaux, et voit de toutes parts
Reparaître les fruits, les hommes et les arts.
Tout renaît, nos malheurs, et nos crimes ensemble.
Sous des toits chancelants d’abord on se rassemble :
La crainte fait chercher des asiles plus sûrs ;
On creuse les fossés, on élève les murs :
De ceux de ses voisins on jure la ruine.
On attaque, on renverse, on pille, on assassine.
Homme injuste et cruel, que dans son repentir
Le Dieu qui t’avait fait voulut anéantir,
Malheureux dont il vient d’abréger la carrière,
Pourquoi brille ce fer dans ta main meurtrière ?
Le ciel t’a-t-il encor accordé trop de jours ?
Mais qui va de leur rage entretenir le cours ?
Quel intérêt les forme au grand art de la guerre ?
Egaux, et souverains, tous maîtres de la terre,
Ils la possèdent toute, en n’y possédant rien.
Il est à moi ce champ ; ce canton c’est le mien.
Ce ruisseau… de mon bras il faut que tu l’obtiennes.
S’il coulait sous tes lois, qu’il coule sous les miennes.
On s’empare d’un arbre ; on usurpe un buisson.
De roi, de conquérant le vainqueur prend le nom.
Dans son vaste domaine il met cette rivière :
Bientôt cette montagne en sera la frontière.
L’Alexandre