Page:Oeuvres de Camille Desmoulins - Tome 1.djvu/559

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 169 —

crainte de les envoyer au Luxembourg, dans le cas où ils viendraient à déplaire ? Y a-t-il beaucoup de députés, y a-t-il beaucoup d’hommes tout à fait inaccessibles à l’espérance et à la crainte ? Dans la république même, l’histoire ne compte pas un Caton sur plus d’un million d’hommes. Pour que la liberté pût se maintenir à côté d’un pouvoir si exorbitant, il faudrait que tous les citoyens fussent des Catons, il faudrait que la vertu fût le seul mobile du gouvernement. Mais si la vertu était le seul ressort du gouvernement, si vous supposez tous les hommes vertueux, la forme du gouvernement est indifférente et tous sont également bons. Pourquoi donc y a-t-il des gouvernements détestables et d’autres qui sont bons ? Pourquoi avons-nous en horreur la monarchie et chérissons-nous la République ? C’est qu’on suppose avec raison que les hommes n’étant pas tous également vertueux, il faut que la bonté du gouvernement supplée à la vertu, et que l’excellence de la république consiste en cela précisément, qu’elle supplée à la vertu.

Je crois encore ce que je disais dans mon numéro 3, des Révolutions de Brabant, malheur aux rois qui voudraient asservir un peuple insurgé. La France ne fut jamais si redoutable que dans la guerre civile. Que l’Europe entière se ligue et je m’écrierai avec Isaac : Venez Assyriens ; et vous serez vain-