Page:Oeuvres de Camille Desmoulins - Tome 1.djvu/524

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 134 —

que la réception de ce fameux discours de Barère a dû charmer Pitt plus que la nouvelle de Pondichéry, et que les Anglais n’auront pas manqué de se dire : « Puisque Londres est Carthage, ayons le courage des Carthaginois, faisons plutôt, comme eux, des cordages et des arcs avec nos cheveux, et donnons à Pitt jusqu’au dernier schelling, et levons-nous aussi en masse. Mais oserais-tu dire ces vérités à Barère ? Oserais-tu dire que cet Hébert, par exemple, ce Momoro…

CAMILLE DESMOULINS.

Oui, si l’on sauvait la République. Mais quel bien lui reviendrait-il, quand j’aurais voué à l’infamie tous ces noms obscurs ? La clémence de tous ces amours-propres blessés parviendrait peut-être à me mettre hors d’état de remédier aux maux de la patrie. Aussi trouve-t-on que je jette au son, sans pitié, ces six grandes pages de mes causticités. La satire est extrêmement piquante, elle me vengerait, elle ferait courir tout Paris chez Desenne, moins encore par la vérité des choses, que par la témérité de les dire ; car un ouvrage qui expose son auteur a toujours bien plus de vogue. Mais, en méditant sur la naissance, les progrès et la chute de la République, je me suis convaincu que les animosités, l’amour-propre et l’intempérance de langue, leur avaient plus nui que le mulet chargé d’or de Philippe.