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refusent pas à un vieux patriote la liberté qu’on donnait aux voleurs dans les Saturnales, donne de l’air, mon ami, à ton cœur étouffé, ouvre un passage à cette fumée dont tu es suffoqué au dedans et qui te noircit au dehors, faute d’une cheminée ; parle, dissipe cette vapeur mélancolique : en passant, voici ma réponse provisoire et, en un mot, à tous tes griefs. La Révolution est si belle en masse, que je dirai toujours d’elle, comme Bolingbrocke dit un jour de Marlborough : C’était un si grand homme, que j’ai oublié ses vices. Maintenant, poursuis ta tirade.

LE VIEUX CORDELIER.

Et moi, je te pardonne ton amour aveugle et paternel pour la Révolution et la République. Tu as eu tant de part à sa naissance ! Mais je ne gronde point ton enfant ; je ne suis point en colère ; je lui demande seulement, à la République naissante, s’il n’est pas permis de lui faire les très humbles remontrances que souffrait quelquefois la monarchie. Tu prétends que Barère aime la liberté de la presse, on ne lui en demande pas tant ; qu’il aime seulement la liberté des opinions dans l’assemblée nationale. Mais oserais-tu dire cette vérité qui est pourtant incontestable, que Barère, par son fameux rapport sur la destruction de Londres, a véritablement fait le miracle de ressusciter Pitt que tout le monde ju-