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d’un simple bâton, valait à lui seul une compagnie de muscadins. Comme tous les patriotes aiment Robespierre ; comme, dans le fond, Nicolas est un patriote, et qu’il n’y a que la séduction du pouvoir, et l’éblouissante nouveauté d’une si grande puissance, entre ses mains, que celle de vie et de mort, qui peut lui avoir tourné la tête, nous l’avons nommé juré du tribunal révolutionnaire, dont il est en même temps imprimeur. Or, et c’est par là crue je voulais conclure, sans me permettre aucune réflexion, croirait-on qu’à ce sans-culotte qui vivait si sobrement, en janvier, il est dû en nivôse, plus de 150,000 fr., pour impressions, par le tribunal révolutionnaire, tandis que moi, qu’il accuse, je n’ai pas accru mon pécule d’un denier. C’est ainsi que moi, je suis un aristocrate qui frise la guillotine, et que Nicolas est un sans-culotte qui frise la fortune.

Défiez-vous, Monsieur Nicolas, de l’intérêt personnel qui se glisse même dans les meilleures intentions. Parce que vous êtes l’imprimeur de Bouchotte, est-ce une raison pour que je ne puisse l’appeler Georges sans friser la guillotine ? J’ai bien appelé Louis XVI mon gros benêt de roi, en 1787, sans être embastillé pour cela. Bouchotte serait-il un plus grand seigneur ? Vous, Nicolas, qui avez aux Jacobins l’influence d’un compagnon, d’un ami de Robespierre ; vous qui savez que