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cendant le Pont-Royal vis-à-vis les Tuileries, sa voiture avait pris à gauche du côté de Versailles. Bientôt, de Paris la défiance gagnait la province, le soupçon gardait les chemins ; il se dressa aux portes des villes, il ameuta les villages, il s’étendit le long des frontières ; la municipalité de Villenaux retint Besenval prisonnier. Cazalès, qui avait quitté précipitamment l’Assemblée nationale où il devait s’illustrer par les combats de l’éloquence, Cazalès fut arrêté à l’entrée de Caussade et rendu malgré lui à la renommée. L’abbé Maury s’était enfui vers le Nord, après avoir jeté son rabat, noué ses cheveux ; mais, comme il traversait Péronne, des paysans remarquèrent qu’il ne portait point de cocarde à son chapeau ; on l’interrogea, on le reconnut, on lui fit une prison d’une salle de l’hôtel de ville de Péronne.

… Tout concourait à exciter, à aigrir la méfiance populaire, ce n’était que messages funestes, que courriers mystérieux sillonnant la route. Pour comble, le premier pouvoir issu de la révolution se montrait incertain, il se refusait sinon aux soucis, du moins à la responsabilité de la vigilance. Ils avaient évidemment peur des conditions auxquelles les jours de crise mettaient le salut commun ; et pendant qu’à l’Hôtel de ville les délégués de la haute bourgeoisie ne se faisaient pas scrupule d’apporter d’injurieuses restrictions au droit de