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fois riches par le jeûne des Français et des Allemands.

Foulon était spéculateur, financier, traitant d’une part, de l’autre membre du conseil qui seul jugeait les traitants. Il comptait bien être ministre. Il serait mort de chagrin si la banqueroute s’était faite par un autre que par lui ; les lauriers de l’abbé Terray ne le laissaient pas dormir. Il avait le tort de prêcher trop haut son système ; sa langue travaillait contre lui, et le rendait impossible. La cour goûtait fort l’idée de ne pas payer, mais elle voulait emprunter, et pour allécher les prêteurs il ne fallait pas appeler au ministère l’apôtre de la banqueroute.

Foulon était déjà vieux du bon temps de Louis XV, de cette école insolente qui faisait gloire de ses vols, qui les montrait hardiment, qui, pour trophées de brigandages, bâtissait sur le boulevard le pavillon de Hanovre. Lui, il s’était construit, au lieu le plus fréquenté, au coin du boulevard du Temple, un délicieux hôtel que l’on admirait encore en 1845.

Il était convaincu qu’en France, comme dit Figaro Beaumarchais : « Tout finit par des chansons ; » donc qu’il faut payer d’audace, se moquer de l’opinion, la braver… de là des paroles qui se répétaient partout : « S’ils ont faim, qu’ils broutent l’herbe… Patience ! que je sois ministre, je leur ferai manger du foin ; mes chevaux en mangent… » On lui impu-