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nisme, qui n’est que le théisme altéré ; et au lieu de la procession des Rogations, nous aurons la procession de la fête des Palès ; au lieu de l’eau bénite, l’eau lustrale ; au lieu du pain bénit, les agapes, les repas en commun des pythagoriciens ; au lieu de cette plaque de cuivre ou d’argent qu’on nous présente, nous aurons l’ancienne cérémonie du baiser de paix, institution si charmante pour qui savait se placer avantageusement. Avons-nous rien de plus pieux que la prière d’Épictète ou l’hymne de Cléanthe ? Qui est-ce qui ne se trouve pas aussi dévot, aussi recueilli, lorsqu’à l’opéra d’Alceste il entend la prière du grand prêtre, que lorsqu’à Notre-Dame il entend l’O salutaris de Gossec ? Pas une de nos fêtes qui ne soit une imitation des fêtes païennes. Il y a plus ; nous n’avons souvent imité de ces fêtes que leurs extravagances, sans retenir leur but moral. Je n’en veux pour exemple que ces formules tant décriées, auxquelles est venu succéder le carnaval. Aux Saturnales les païens se comportaient comme si le monde allait finir. C’était une fête commémorative, instituée pour rappeler l’égalité originelle ; c’étaient des espèces de déclarations chommée des droits de l’homme, tout y représentait l’anéantissement futur des sociétés. Il n’y avait plus de tribunaux, plus d’écoles, plus de sénat, plus de guerre. Tous les états étaient confondus. On régalait les pauvres à