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lices bourgeoises, de milices[1] comme la magistrature, comme le sacerdoce, où les vertus, la voix publique, la considération mèneront à tout, et la naissance, l’argent, la faveur du prince, à rien. Nous aurons des bailliages provinciaux, des assemblées municipales, une assemblée nationale perpétuelle, arbitre de la paix et de la guerre ; des traités et des ambassades ; non pas une Assemblée nationale dont les membres puissent se déclarer inamovibles, héréditaires, comme M. de Mirabeau en admet la possibilité dans sa onzième lettre, hypothèse qui m’a étrangement surpris de la

  1. M. de Mirabeau qui, dans son excellent ouvrage des Lettres de cachet, dès 1782, avait montré tant de choses à faire, et n’avait laissé si peu à dire à l’Assemblée nationale, me paraît y avoir parfaitement prouvé que les troupes réglées et perpétuelles ne sont bonnes qu’à retenir une nation dans les fers, et non à la défendre. À Rome, les troupes réglées sous les empereurs perdirent tout ce qu’avaient conquis les milices bourgeoises sous les consuls. Ces Grecs si fameux avaient-ils des troupes réglées ? Les Suisses en ont-ils ? Le jeune Scipion, Lucullus, l’eunuque Narsès, Torstenson, Alexandre, Annibal et tous les grands capitaines ont montré que ce n’est point la poussière des camps et l’expérience qui donnent le génie des batailles ; et pour remporter des victoires, à dix-neuf ans, comme Pompée, il n’a manqué à notre cher et illustre général, M. de Lafayette, que d’avoir des armées à commander ; aujourd’hui que l’artillerie et les ingénieurs décident presque seuls des événements d’uae campagne, que l’esprit de conquête s’est perdu, que l’impraticable paix de l’abbé de Saint-Pierre commence à n’être plus le rêve d’un homme de bien, que la philosophie et l’esprit de liberté