Page:Oeuvres complètes de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre, Tome 10, 1820.djvu/281

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faire Sophie infidèle ; je me suis toujours figuré qu'une Sophie ferait un jour mon bonheur. D'ailleurs, ne craignez-vous pas qu'en voyant Sophie coupable, on ne vous demande à quoi servent tant d'apprêts, tant de soins ? est-ce donc là le fruit de l'éducation de la nature ? Ce sujet, me répondit-il, est utile; il ne suffit pas de préparer à la vertu, il faut se garantir du vice. Les femmes ont encore plus à se méfier des femmes que des hommes. Je crains, répondis-je, que les fautes de Sophie ne soient plus contraires aux mœurs, que l'exemple de sa vertu ne leur sera profitable : d'ailleurs, son repentir pourrait être plus touchant que son innocence ; et un pareil effet ne serait pas sans danger pour la morale. Comme j'achevais ces mots, le garçon de l'auberge entra, et dit tout haut : Messieurs, votre café est prêt. Oh ! le maladroit, m'écriai-je ! ne t'avais-je pas dit de m'avertir en secret quand l'eau serait bouillante? Eh quoi, reprit Jean-Jacques, nous avons du café ? En vérité, je ne suis plus étonné que vous n'ayez rien voulu mettre dans votre boîte ; le café y était. Le café fut