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fer vous énerve et le bateau vous rend malade… Tant que la science ne vous aura pas donné des ailes, je ne vois pas comment il serait possible de vous transporter quelque part… Vous n’aimez ni les ports, ni la mer, ni les forêts, ni les jardins, ni les champs, ni les villes… En vérité, je ne sais plus que faire… Je ne sais plus que vous offrir.

— Mais naturellement, mon pauvre ami, répondait Clotilde avec une moue dont je ne saurais rendre l’expression méprisante. Vous êtes tellement maladroit… Il n’y a pas un homme aussi gauche que vous… Vous ne savez rien trouver pour distraire une femme…

— Oh ! Clotilde ! Clotilde ! Vous me rendez fou !… Et votre injustice m’est une peine affreuse !

Elle ricochait :

— Mon injustice !… Il ne manquait plus que cela ! Vous ne faites que des bêtises, et c’est moi qui suis injuste !… D’abord, pourquoi m’avez-vous amenée dans cette Angleterre que je hais et que vous saviez que je haïssais.

Je bondis sur mon siège…

— C’est trop fort ! m’écriai-je en protestant avec des gestes violents. Comment ! Vous prétendez que c’est moi qui vous ai amenée ici ?…

— Et qui donc alors ?… Est-ce que vous perdez tout à fait la raison ?