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II


Clotilde passa cinq jours, cinq jours de torture pour moi, cinq jours éternels à s’installer, à ranger, méthodiquement, sur de petites tables ornées de dentelles, ses bibelots de toilette : boîtes à couvercle d’or, flacons de cristal à bouchon d’or, et des trousses précieuses, et des glaces anciennes, et des brosses, et de tout !… Je ne pouvais l’approcher ni lui parler, tant elle était absorbée par ces graves travaux. Elle n’avait le temps ni de me regarder, ni de m’écouter. Quand je lui parlais, elle n’avait le temps de rien, pas même de s’habiller, ni de prendre ses repas… Quelques brioches, grignotées à la hâte, en courant, et c’était tout !… Mal aidée par ses deux femmes de chambre qui ne la comprenaient point et que déroutaient ses ordres nerveux, elle allait, dépeignée, ennuyée, impatiente, d’une malle à l’autre, d’une pièce dans l’autre, sans savoir pourquoi et ce qu’elle voulait.

Oh ! les effusions que je m’étais promises !… Et les longs enlacements, et les longues ten-