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geai dans le corridor : je m’attendais à voir, soudain, une tête surgir, menaçante, dans l’obscurité, un couteau briller dans la nuit. Mais rien… La bête, gavée de meurtre, dormait dans son repaire… Je descendis l’escalier, tirai le verrou de la porte, et, défaillant, les veines glacées, je m’abattis dans le ruisseau de la rue déserte…

Le docteur Bertram avait très attentivement écouté mon récit.

— Et c’est là qu’on vous a retrouvé, mon bon monsieur Fearnell, et dans quel état, mon Dieu ! Pourriez-vous reconnaître la maison ?

— Oui, lui répondis-je, mais à quoi bon ?

— Eh bien, guérissez-vous, et nous irons ensemble chez vos assassins.

Huit jours après, le docteur et moi, nous nous engagions dans Lawer-Abbey-Street. Je reconnus la terrible maison. Tous les volets étaient mis aux fenêtres ; au-dessus de la porte, un écriteau se balançait : À louer.

Je m’informai auprès d’une voisine.

— Ils sont partis il y a quinze jours, me dit-elle. C’est grand dommage pour le quartier, car c’étaient de bien braves gens.