Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/195

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mieux que je ne vous le dis, assurément !… Il est encore à son bureau… Mon Dieu ! s’il avait su ! lui qui aime tant notre Lizy !… Je ne l’avais pas averti, ah ! non… Il en serait devenu malade !… »

« Puis elle ajouta timidement :

« — Voyons, monsieur, après nous avoir procuré une si grande joie, voudriez-vous nous accorder un grand bonheur ?… Mais je n’ose, en vérité. Ce serait, oui, ce serait… d’accepter, demain… notre modeste dîner… Ah ! je vous en prie !… Ne nous refusez pas… Demain, il nous arrive un savant comme vous, avec qui vous aurez plaisir à causer, j’en suis certaine… Et puis mon mari sera si heureux… si heureux… si fier !… »

« Décidé à compléter ma bonne action, je n’osai refuser et je pris congé.

« Je revins le lendemain, à l’heure fixée. Vous pensez bien qu’après les protestations de la mère, je dus subir les protestations du père, lesquelles furent aussi chaleureuses. La petite Lizy me sauta au cou et me prodigua toutes ses câlineries, toutes ses tendresses d’enfant rieuse ; j’étais vraiment de la famille. Le dîner fut gai, le savant annoncé me parut intéressant ; bref, je passai une excellente soirée.