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La Chambre close.


I


J’ouvris les yeux et je regardai autour de moi. Un homme était penché sur mon lit ; près de l’homme, une femme, coiffée d’un bonnet à grandes ailes blanches, tenait en ses mains des compresses humides. La chambre vibrait, claire et simple, avec ses murs tapissés d’un papier gris pâle à fleurettes roses. Sur une table recouverte d’une grosse serviette de toile écrue, je remarquai divers objets inconnus, des rangées de fioles et un vase de terre brune plein de morceaux de glace. Par la fenêtre entr’ouverte, l’air entrait, gonflant comme une voile les rideaux de mousseline, et j’apercevais un pan de ciel bleu, des cimes d’arbres toutes verdoyantes et fleuries se balançant doucement dans la brise. Où donc étais-je ? Il me sembla que je sortais d’un long rêve, que j’avais, pendant des années, vécu dans le vague et pour ainsi dire