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images de saints, des vierges en plâtre colorié, des bénitiers, des crucifix, des paroissiens, quantité d’objets de piété, tels que médailles, scapulaires et chapelets succéder triomphalement aux célébrités révolutionnaires, aux danseuses décolletées et aux brochures subversives. La salle de rédaction agrandie, entièrement remeublée et décorée des plus rassurantes images, fut désormais le centre de l’agitation cléricale et tout ce que la ville et tout le pays environnant comptaient de bourgeois vertueux, d’aristocrates hautains, de prêtres militants, oubliant les anciennes injures, se donnèrent rendez-vous autour de la grande table verte que présidait, sous le regard bienveillant du pape, Alcide Tourneroche, avec une gravité majestueuse et comique. Enfin, il fréquenta assidûment la messe, et il suivit, avec dévotion, un cierge à la main, les processions de la Fête-Dieu.

— Une affreuse fripouille… Mais pas mauvais diable, au fond ! me disait le marquis, qui m’avait raconté avec une indulgence amusante, amusée, tous les détails de cette histoire de brigands.

Je vis la boutique, la salle de rédaction, je vis Alcide Tourneroche lui-même à qui le marquis annonça qu’il allait donner, à cause des événements, plus de place à la politique dans Le Cultivateur normand, et qu’il m’avait chargé de ce soin. Il ajouta, sans le moindre ménagement pour l’amour-propre de son rédacteur :