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faisance… et toute une série de lettres en anglais, à propos de courses, de chiens, de maquignonnage… Çà et là, des protêts… des menaces de poursuites judiciaires… que sais-je encore ? toute une vie active, multiple, disparate, désordonnée, une vie de bas plaisirs, de luttes incessantes, de difficultés surmontées à force d’audace, d’ingéniosité vulgaire mais retorse, d’expédients connus… Cela m’intéressait, certes, et me désenchantait en même temps. Rien qu’à l’allure si particulière du marquis, j’avais rêvé de plus grandiose crapulerie… des intrigues amoureuses compliquées, perverses et dramatiques… l’explication d’une situation conjugale… cocasse… un peu de crime aussi… or, rien ou presque rien de ces révélations attendues où se complaisait mon imagination… En remuant ces papiers qui exhalaient comme une barbare odeur de tripot, d’écurie, d’officine d’usurier et d’huissier, j’avais la sensation un peu courte d’une existence pas sensiblement supérieure à celle d’un viveur quelconque, d’un de ces petits écumeurs de cercles tels que les lieux de plaisir parisiens nous en offrent, quotidiennement, des exemplaires si nombreux, si peu intéressants, si fugaces…

Pourtant, deux sortes de correspondances attirèrent, plus spécialement, mon attention, l’une assez copieuse, signée Karl Backer… l’autre, plus rare, signée tout simplement