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en homme très au fait de ce sport, ajoutant :

— Il faut avoir le culte de ses muscles.

La boxe… l’escrime ?… Et quoi encore ?… Le cheval, sans doute… la chasse… le tennis ?… J’allais donc devenir, ici, quelqu’un de très chic… Ma vanité n’en fut nullement flattée, et ma paresse s’en effraya.

Il fit servir dans le cabinet un petit déjeuner à l’anglaise que je partageai avec lui, se montra aimable, bon enfant… Je constatai avec plaisir qu’il avait le réveil gai.

— Que je ne vous dérange pas !… me dit-il ensuite… Travaillez… travaillez… comme si je n’étais pas là…

Appuyé contre l’embrasure de la fenêtre, il lima, tailla minutieusement ses ongles et il resta là quelque temps, silencieux, l’esprit occupé à je ne sais quoi… Puis, il se retira, me disant qu’il allait faire un tour, à cheval, jusqu’à Sonneville-les-Biefs où il devait présider une réunion du conseil municipal.

— Car je suis maire, mon cher… ne l’oublions pas…

— Et Berget est votre prophète, je veux dire votre adjoint, monsieur le marquis… complétai-je un peu trop familièrement peut-être.

— Comment ?… Vous connaissez Berget ?… Un homme admirable… le plus grand ivrogne du département !

Je l’entendis, durant un quart d’heure, parler,