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dans les hôtels de la ville et les châteaux des environs… Si vous demandez :

— De qui est ce tableau ?… ce plafond ?… cette grande fresque ?

On vous répondra invariablement :

— C’est de l’École de Dusseldorf…

Dans le cabinet d’un gros métallurgiste, j’ai vu un portrait de Bismarck, en général, casqué, botté, immense, énorme, avec des reflets mauves, des reflets jaunes, des reflets verts, roses, lilas, plaqués, maçonnés sur la figure, la tunique, le casque et les bottes… Et le vieux Bismarck arrivait ainsi à ressembler étonnamment à cette jolie Madame Roger-Jourdain, dont Albert Besnard fit un portrait si frissonnant…

J’aurais bien voulu savoir de qui était ce Bismarck à reflets.

— C’est de l’École de Dusseldorf…

Je ne pus tirer rien de plus de mon gros métallurgiste.

Pourquoi notre Académie des Beaux-Arts – ah ! on ne peut jamais retrouver le nom d’aucun de ses membres – ne se constituerait-elle pas franchement en société anonyme d’exploitation artistique ?… Cela faciliterait beaucoup les transactions entre amateurs, et simplifierait la besogne des pauvres critiques d’art…

L’Empereur ne vient plus jamais à Dusseldorf. Il n’y est pas populaire, et chacun parle de lui assez librement. On ne lui pardonne pas son ingratitude envers Bismarck, qui est vénéré, ici, où tout le monde vous dit :

— Bismarck, monsieur, mais c’est l’âme même de l’Allemagne !