Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/347

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ah ! je vois qu’il ne te plaît pas…

— Mon Dieu !

— Que lui reproches-tu ?

— Je dois le dire à monsieur… Monsieur manque quelquefois de chic pour ses qualificatifs… Ils sont trop simples… Ils ne peignent pas assez exactement les objets… Ainsi dans l’article de ce matin, monsieur dit d’une orchidée qu’elle est belle. Sans doute, une orchidée est belle… Mais ce n’est pas la beauté… la beauté vague qui fait le caractère de l’orchidée… L’orchidée, monsieur, est étrange, maladive, perverse, fallacieuse, déconcertante… Moi, j’aurais écrit : « la déconcertante orchidée »… Je dis ça à monsieur…

— Mais tu as raison… avoua Maupassant que les réflexions de son valet de chambre amusaient toujours. Sais-tu que tu es épatant ?…

— Oh ! monsieur !

— Mais si… Et où as-tu appris tout ça ?

Alors, il se rengorgea, et, très sérieux :

— Monsieur, répondit-il… monsieur sait bien qu’avant de servir chez monsieur, j’ai servi trois ans chez un poète belge !…

Et, après un petit silence, négligemment :

— Monsieur n’oublie toujours pas mes palmes pour le 1er janvier ?…



Modern-style.


Le Bradenbrager-Hof, qui, je ne sais pourquoi, m’a rappelé le valet de chambre de Maupassant, est un de ces grands hôtels, comme on en trouve dans les moindres villes d’Allemagne, et comme nous n’en avons qu’à Paris et dans quelques villes d’eaux, un de ces caravansérails nouveaux et art nouveau d’Occident, construits par