Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/257

Cette page n’a pas encore été corrigée

ce ne soient point des métaux inconnus… de fantastiques métaux…

Ses yeux brillaient :

— Et avec des propriétés, mon cher !

À mesure qu’il parlait, sa fortune prospérait, et il arrachait un secret de plus à la nature…

Il avait beau vieillir, le pauvre Weil-Sée, il ne changeait pas…

Très jeune, je l’avais rencontré à Manchester, passionné de géologie et cherchant, en même temps, des capitaux pour une fabrique d’armes tellement redoutables, que c’en était fini de la guerre… C’était lui, pourtant, qui m’avait aidé à supporter les plus dures journées de cet hiver 70-71, où, sous les ordres de Chanzy, les loqueteux que nous étions fuyaient de tous les côtés de la Loire… Ah ! sa tendresse et sa gaîté, durant ces affreuses semaines !… Je ne l’avais plus retrouvé qu’à la Bourse, à son retour du Paraguay, enthousiaste du caoutchouc… à la Bourse, dont il fut, plus tard, au krach de Bontoux, une des innombrables victimes.

— Comprenez… mon cher… que ce qu’il me faut… c’est une fortune… mais une fortune, tellement folle, qu’elle rende les autres fortunes impossibles… comme il a fallu les trusts, pour voir la fin de l’industrie privée…

Depuis le krach, il avait cherché et découvert du graphite en Sibérie, de l’étain en Espagne, du fer en Australie, du manganèse en Transylvanie, du cuivre en Roumanie et jusqu’à du pétrole en Galicie, mais toujours trop tôt… Aucune banque ne voulait croire en lui… Son imagination, sa culture générale, l’énormité de son lyrisme idéologique terrifiaient aussi les gens d’affaires…

— C’est peut-être un bien que je n’aie pas réussi trop jeune… Car, à présent que je sais…