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qui galopent. La plaine aussi s’immatérialise, emportée dans un galop surnaturel… Et voici des vallons, des gorges rocheuses, des montagnes… des forêts… Au galop ! Au galop !… À peine entrevus, aussitôt dépassés. Au galop !… A-t-on le temps de penser, de rêver, de pleurer ? Au galop les petites joies attendrissantes, les petites douleurs qui larmoient et où se complaît l’enfantillage des souvenirs !… D’ailleurs, sont-ce des joies, des douleurs, des souvenirs ?… On ne sait pas… on ne le sait pas plus, que, des arbres, on ne sait s’ils sont ormes, peupliers, hêtres ou sophoras… On ne sait rien… À peine sait-on que l’air qui fouette le visage, et qu’on avale, avec toutes sortes de poussières, on s’en grise, et qu’on est ivre, comme tout l’univers !…



Vincent van Gogh et Bréda


La route d’Anvers à Bréda n’est ni meilleure ni pire que la plupart des routes de Belgique. Elle leur ressemble par sa monotonie. Ainsi s’explique — car il n’eût pas suffi de ma rêverie — que je n’aie point reconnu la Hollande, dans cette Belgique continuée… Ce n’est rien que de la terre plate, grisâtre, où tout ce qui pousse est chétif, où la lumière lourde et opaque est celle de tous les pays à qui l’eau manque. Rien n’est triste comme la traversée de ces champs sans sève et de ces petits bois mal venus, dont on rencontre pas mal de bouquets…

— Assez bien de bouquets… diraient nos excellents amis les Belges, auxquels, même en Hollande, il m’arrive de penser encore en riant…