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Qu’en fais-tu, de Moïse ?… Et la poudre, l’as-tu aussi inventée, la poudre ?… Tu me copieras mille fois cette phrase : « J’ai inventé les puits artésiens. »

C’est à ce pensum, sans doute, que je dois de ne pas avoir, plus tard, inventé la poudre… J’eus trop de honte.



Le goût que j’ai pour l’auto, sœur moins gentille et plus savante de la barque, pour le patin, pour la balançoire, pour les ballons, pour la fièvre aussi quelquefois, pour tout ce qui m’élève et m’emporte, très vite, ailleurs, plus loin, plus haut, toujours plus haut et toujours plus loin, au delà de moi-même, tous ces goûts-là sont étroitement parents… Ils ont leur commune origine dans cet instinct, refréné par notre civilisation, qui nous pousse à participer aux rythmes de toute la vie, de la vie libre, ardente, et vague, vague, hélas ! comme nos désirs et nos destinées…



La locomotive qui me fut chère, jadis, je ne l’aime plus. Elle est sans fantaisie, sans grâce, sans personnalité, trop asservie aux rails, trop esclave des stupides horaires et des règlements tyranniques. Elle est administrative, bureaucratique ; elle a l’âme pauvre, massive, sans joies, sans rêves, d’un fonctionnaire qui, toute la journée, fait les mêmes écritures sur le même papier et insère des fiches, toujours pareilles, dans les cases d’un casier qui ne change jamais. Sur ses voies clôturées, entre ses talus d’herbe triste, elle me fait aussi l’