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L’escalier est noir. La concierge est à l’entresol, dans une sorte de réduit encombré, au plafond bas, dont la seule fenêtre prend l’air sur l’escalier et où pèse une constante odeur de soupe aux choux. Sur le poêle de fonte, mijote on ne sait quel ragoût, qui semble à demeure.

— Au cinquième… quatrième porte à droite, répond une aigre voix invisible.

Je monte l’escalier, en tâtant tantôt la rampe et tantôt le mur. J’hésite au cinquième, sur le palier où des carrefours de couloirs aboutissent. Enfin, je frappe à la porte. La voix de Dingo me répond. J’entends un bruit d’étoffes remuées. Une jeune femme en peignoir m’ouvre la porte. Une autre est à coudre, assise sur le tapis, qui, par places, a perdu sa laine et ne montre plus qu’une surface sale et jaunie, comme une vieille toile de sac. Dingo a bondi, et, les pattes dressées jusqu’à mes épaules, me caresse, me lèche en poussant des cris joyeux. Il est inutile que je me présente. Dingo s’est chargé de la présentation.

Des jupes, des corsages d’un jaune trop éclatant ou d’un mauve trop violet sont posés un peu partout, sur la table, sur les chaises, sur le tapis. La chambre est carrelée et un mansardement très oblique laisse dans un triste demi-jour les objets qui ne sont pas en face de la fenêtre.