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Et ce fut bientôt le tour des canards, des oies de Siam, des cygnes blancs, des cygnes noirs, des bernaches, sarcelles et de tous ces jolis volatiles qui ornaient la pièce d’eau.

Puis les bêtes du voisin y passèrent, et toutes celles du voisin de mon voisin.

En un mois, Dingo avait ravagé tous les poulaillers, tous les clapiers, toutes les volières, toutes les cages, toutes les mares du village. Un mois seulement et je crois bien que, de toutes les bêtes vivantes du village, il ne restait plus que les habitants.

Il y eut de terribles tragédies.

Comme je sortais de chez moi un après-midi, par la grille qui donne sur la grand’place, je vis que Ponteilles était en rumeur. À ce rassemblement inusité, à cette effervescence, je compris tout de suite qu’il s’agissait de Dingo. Heureusement, Dingo ne m’avait pas accompagné. Il était resté dans mon cabinet de travail, près de Miche qui avait grand mal au cœur, pour avoir dévoré une musaraigne le matin. Que serait-il advenu, s’il m’eût accompagné ? Je ne puis penser à cela sans un frisson.

Une grosse dame, une dame énorme et furibonde en qui je reconnus la belle Irma Pouillaud, pérorait, gesticulait violemment parmi d’autres