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et du ton sacerdotal sur lequel il l’avait proférée. Nous nous promenâmes dans le jardin. Au choix des plantes, à leur disposition, je reconnaissais partout le goût de Mme Legrel. Elle avait le goût des décorations florales de plein air, comme elle avait le goût des arrangements intérieurs. Il était délicieux ce jardin, tout fleuri d’espèces vivaces, avec des coins abandonnés où les plantes sauvages poussaient librement leur touffes primitives et amies.

— Père, dit Irène… si on menait Dingo voir mon mouton ?

— Oui, ma chérie, après le déjeuner, consentit Legrel.

Irène fut contente :

— C’est ça… Après déjeuner. Nous leur ferons faire une bonne partie à Dingo et au mouton.

Legrel m’expliqua que son ami, le célèbre naturaliste et philosophe sir John Lubbock avait envoyé tout dernièrement à Irène un mouton extraordinaire dont la tête toute noire, lisse et luisante comme un masque de satin, sortait d’un gros paquet de laine blanche et si longue qu’elle traînait à terre et le recouvrait entièrement, ainsi qu’une jupe. Magnifique exemplaire d’une race presque entièrement disparue, même au Thibet, dont il est originaire.

— Les Anglais sont tentés de le reproduire à