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paletots sacs, amples, dont les poches, on ne sait comment, au cours des promenades, engloutissent automatiquement quantité d’objets bizarres, souvent malpropres, toujours inutiles. Modeste, très réservé, très effacé, extrêmement timide, scrupuleux à ne jamais blesser personne, il ne vit, loin de toutes sollicitations, de toutes intrigues, que pour les joies silencieuses du travail, et l’orgueil des découvertes scientifiques… orgueil strictement intérieur, car jamais il ne lui arrive de parler de ses travaux, de se vanter de ses découvertes, dont quelques-unes, paraît-il, furent capitales.

Cela seul suffit à expliquer qu’il n’ait pu encore obtenir le moindre honneur, la moindre distinction officielle, qu’il n’ait été chargé d’aucune mission par un gouvernement républicain, qui ne s’intéresse, dans les sciences comme dans les arts, qu’aux individualités médiocres, routinières, réclamières et protégées… Est-il besoin de dire — car ceci découle naturellement de cela — que les grandes revues à inspiration et commandite académiques ont toujours refusé de lui ouvrir leurs portes orthodoxes et sacrées, qu’elles ne mentionnent ses travaux qu’avec des réserves agressives et une sorte de respect, qu’elles s’acharnent à rendre cruellement ironique et rabaissant. Nous ignorerions encore certaines de