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VI


Pierre Piscot vient faire des journées chez moi, autant qu’il veut. Le jardinier l’emploie à lier les salades, sarcler les semis, désherber les plates-bandes et ratisser les allées. L’hiver, il ébranche les arbres, casse le bois, ramasse les feuilles, fume le jardin et le laboure. C’est un bon ouvrier. Il a une spécialité amusante qui fait la joie de Dingo. Personne ne prend les taupes aussi adroitement que lui. Ne lui parlez pas de les prendre au piège. Il méprise les pièges, « car les taupes ont du vice », et elles savent très bien les éviter et les tourner. À cinq heures, à dix heures du matin, à cinq heures du soir, qui sont les heures réglementaires où les taupes voyagent dans les galeries et cherchent leur nourriture souterraine, il surveille les taupinières, l’œil attentif, la bêche bien en main. Quand la taupe « fouille », il attend patiemment qu’elle affleure le sol ameubli. D’un coup de louchet vivement et sûrement donné, il la