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le veritable Devot n’ayent qu’une mesme apparence ; mais Moliere, dont la prudence egale l’esprit, ne dit pas dans toute sa Piece, deux vers contre les Hypocrites, qu’il n’y en ait ensuite quatre à l’avantage des vrais Devots, et qu’il n’en fasse voir la diflerence. C’est ce qui a fait approuver le Tartuffe par tant de gens de merite, depuis que les Hypocrites l’ont voulu perdre. Dans toutes les lectures que son Autheur a faites aux veritables Devots, cette Comedie a tousjours triomphé à la honte des Hypocrites, et ceux qui n’auroient pas deu la souffrir à cause de leur profession, l’ont admirée ; ce qui fait voir qu’on ne pouvoit la condamner, à moins d’estre surpris par les Originaux dont Tartuffe n’est qu’une Copie. Ils n’ont point dementy leur caractere pour en venir à bout ; leur jeu a tousjours esté couvert, leur pretexte specieux, leur intrigue secrette ; ils ont cabalé avant que la Piece fust à moitié faite, de peur qu’on ne la permist, voyant qu’il n’y avoit point de mal. Ils ont fait enfin tout ce que des gens comme eux ont de coustume, et se sont servis de la veritable devotion pour empescher de jouer la fausse. Je n’en dois pas demeurer là et j’ay trop de choses à dire à l’avantage de Tartuffe, pour finir sitost sa justification, puisque je pretends prouver qu’il est impossible de jouer un veritable Devot, quand mesme on en auroit dessein et que l’on y travailleroit de tout son pouvoir. Par exemple, si on eust fait paroistre sur le Theatre un homme à qui on n’eust donne que le nom de Devot, et que l’on luy eust fait en mesme temps entreprendre tout