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Il devait pour le moins, continuë ce Devot à contre-temps, en parlant de l’Autheur du Festin de Pierre, susciter quelque Docteur, pour soustenir la cause de Dieu et deffendre serieusement ses interests. Il falloit donc pour cela que l’on tinst une Conference sur le Theatre ; que chacun prist party, et que l‘Athée deduisist les raisons qu‘il avoit de ne croire point de Dieu. La matiere eust esté belle, Moliere n'auroit point esté repris, et l‘on aurait escouté Dom Juan avec patience et sans l’interrompre. Est-il possible que cela ait pu entrer dans la pensée d’un homme d’esprit ! L’Autheur de cette Comedie n'eust eu pour se perdre qu'à suivre ces beaux advis. Il a eu bien plus de prudence, et comme la matiere estoit delicate, il n’a pas jugé à propos de faire entrer Dom Juan en raisonnement ; les gens qui ne sont point preoccupez ne l’en blasmeront jamais, et les veritables Devots n’y trouveront rien à redire.

Ce scrupuleux Censeur ne veut pas que des actions en peinture soient punies par un Foudre en peinture, et que le chastiment soit proportionné avec le crime : Mais le Foudre, dit-il, n’est qu’un Foudre en peinture ; mais le crime l’est aussi ; mais la peinture de ce crime peut frapper l'esprit, mais la peinture de ce Foudre peut esgalement frapper le corps ; on ne sçauroit destruire l’un sans l'autre, ny parler pour l’un, que l’on ne parle pour tous les deux. Mais pourquoy ne veut-on pas que le Foudre en peinture fasse croire que Dom Juan est puny ; nous voyons tous les jours que la feinte mort d’un Acteur fait pleurer à une Tragedie, encore qu'il