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voyez par là que je ne dois pas seulement deffendre la piece de Moliere, mais encore le plus grand, le plus estimé, et le plus religieux Monarque du monde ; mais, comme sa pieté le justifle assez, je serois temeraire de l’entreprendre. Je pourrois dire toutefois qu’il sçavoit bien ce qu’il faisait en laissant jouer le Festin de Pierre, qu’il ne vouloit pas que les Tartuffes eussent plus d’authorité que luy dans son Royaume, et qu’il ne croyoit pas qu’ils pussent estre juges equitables, puisqu’ils estoient interessez. Il craignait encore d’authoriser l’hypocrisie et de blesser par là sa gloire et son devoir, et n’ignoroit pas que si Moliere n’eust point fait Tartuffe, on eust moins fait de plaintes contre luy. Je pourrois adjouster que ce grand Monarque sçavoit bien que le Festin de Pierre est souffert dans toute l’Europe ; que l’Inquisition, quoique très-rigoureuse, le permet en Italie et en Espagne ; que depuis plusieurs années on le joüe à Paris, sur le Theatre Italien et François et mesme dans toutes les Provinces sans que l’on s’en soit plaint, et qu’on ne se seroit pas encore soulevé contre cette Piece, si le merite de son Autbeur ne luy eu suscite des Envieux.

Je vous laisse à juger si un homme sans passion, et poussé par un veritable esprit de charilé, parleroit de la sorte : Certes, c’est bien à faire à Moliere de parler de la Devotion, avec laquelle il a si peu de commerce, et qu’il n’a jamais connue, ny par pratique, ny par theorie. Je croy que vostre surprise est grande, et que vous ne pensiez pas qu’un homme, qui veut passer pour