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femmes qui n’ont aucun lien d’origine avec lui, si tu faisais venir une femme de chez les Hébreux, peut-être prendrait-il le sein d’une femme de sa race ». Son avis parut judicieux et la princesse la pria de lui rendre ce service et d’amener une nourrice. Elle use de la permission, et revient, amenant la mère, que nul ne connaissait. Alors l’enfant, avec une sorte de joie, s’attache au sein et, sur la demande de la reine, la mère se charge entièrement de le nourrir.

6. Dans la suite, la princesse lui donna un nom qui rappelait son immersion dans le fleuve ; car les Égyptiens appellent l’eau et ceux qui sont sauvés ysès[1]. ils lui donnent donc un nom composé de ces deux termes. Et conformément aux prédictions de Dieu, il fut le plus illustre des Hébreux par la grandeur de son intelligence et son mépris des épreuves. [Abram était le septième de ses ascendants ; car il était fils d’Amaram, lequel était fils de Caath, et le père de Caath était Lévi, fils de Jacob, fils d’Isac, fils d’Abram[2].] Son intelligence n’était pas celle d’un enfant de son âge ; elle était bien plus profonde et plus mûre que cet âge ne le comporte ; il en fit voir clairement toute l’étendue dans ses jeux, et présagea par ses premiers actes les choses plus grandes qu’il allait accomplir à l’âge d’homme. Quand il eut trois ans[3], Dieu le fit grandir d’une façon étonnante. Quant à la beauté, personne n’y était assez indifférent pour n’être pas frappé, en apercevant Moïse, du charme de ses traits et il arrivait à bien des gens, quand ils rencontraient Moïse sur leur chemin, de se retourner pour regarder l’enfant et d’aban-

  1. Josèphe substitue ici à l’étymologie biblique de ce nom (Ex., II, 10 : « Car je l’ai tiré des eaux », la racine hébraïque בישה signifiant « tirer » ) une étymologie égyptienne ou prétendue telle (cf. C. Apion, I, § 286). Cette étymologie n’a probablement pas plus de valeur historique que celle qu’il donne de Jérusalem par exemple (v. Ant., I, § 180 et la note). Comparer l’étymologie donnée par Philon dans le De Vita Moysis, 4, M., II, p.  83. Sur l’origine égyptienne du nom de Moise, consulter G. Ebers, op. cit., p.  539
  2. Cette phrase a été condamnée par Eruesti et la plupart des éditeurs ; elle interrompt, en effet, le développement. Mais peut-être trouvait-elle sa place ailleurs et le texte présente-t-il une lacune.
  3. Le Midrash (Ex. R., I) dit que sa mère l’allaita 24 mois et qu’il grandit d’une façon extraordinaire. Dans un texte cité par le Yalkout, I, 168, Rabbi Yehouda ( ?) dit qu’à cinq ans Moïse, pour la taille et l’intelligence, en paraissait onze.