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et de la sollicitude dont vous entourez notre frère et je vous trouve meilleurs que je ne m’attendais d’après le complot que vous avez formé contre moi ; tout ce que j’ai fait là, c’était pour éprouver votre amitié fraternelle ; ce n’est donc pas à votre instinct que j’impute le mal que vous m’avez fait, c’est à la volonté de Dieu, qui nous fait maintenant goûter le bonheur, ainsi qu’il le fera à l’avenir s’il nous reste favorable. À la nouvelle inespérée que mon père vit encore, et en vous voyant ainsi disposés pour notre frère, je ne me souviens plus des fautes dont je vous ai sus coupables envers moi, je renonce aux sentiments de haine qu’elles m’inspiraient et je crois devoir vous rendre grâce, à vous qui avez servi à la réalisation présente des plans divins. Et vous aussi, je veux vous voir oublier tout cela et vous réjouir, puisque l’imprudence de jadis a eu un tel résultat, plutôt que de vous affliger dans la confusion de vos fautes. N’avez pas l’air de vous chagriner d’une méchante sentence portée contre moi et du remords qui vous en est venu, puisque vos desseins n’ont pas abouti. Réjouissez-vous donc de ce que Dieu a fait arriver : allez en informer notre père, de peur qu’il ne soit consumé d’inquiétudes à votre sujet et que je ne sois privé du meilleur de ma félicité s’il mourait avant qu’il pût venir en ma présence et prendre sa part de notre bonheur actuel. Vous l’emmènerez, lui et vos femmes et vos enfants et tous vos parents pour émigrer ici ; car il ne faut pas qu’ils restent étrangers à notre prospérité, ceux qui me sont si chers, surtout puisque la famine a encore cinq années à durer ». Ce disant, Joseph embrasse ses frères. Ceux-ci fondaient en larmes et déploraient la conduite qu’ils avaient eue à son égard : c’était presque comme un châtiment pour eux que la générosité de leur frère. Ils célèbrent alors des festins. Le roi apprit que les frères de Joseph étaient venus chez lui et il s’en réjouit fort comme d’un bonheur de famille ; il leur offrit des voitures remplies de blé, de l’or et de l’argent pour l’apporter à leur père. Ils reçurent plus de présents encore de Joseph, les uns destinés à leur père, les autres à chacun d’eux en particulier, et Benjamin fut le plus favorisé ; puis ils s’en retournèrent.