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douter que Joseph entendait leur langage. La honte les envahit tous aux discours de Roubel, ainsi que le repentir de leur action, comme s’ils n’eussent pas eux-mêmes pris la décision pour laquelle ils jugeaient qu’ils étaient justement châtiés par Dieu[1]. Les voyant dans ce désarroi, Joseph saisi d’émotion, fond en larmes et, pour ne pas se faire connaître à ses frères, se retire, laisse passer quelque temps, puis revient près d’eux. Il retient Syméon comme gage da retour de ses frères et, leur ordonne de se munir, en partant, de leurs provisions de blé, après avoir commandé à l’intendant de mettre secrètement dans leurs sacs l’argent qu’ils avaient emporté pour faire acquisition du blé et de les libérer nantis de cet argent. Celui-ci exécuta ce qu’on lui avait prescrit.

5[2]. Les fils de Jacob, de retour en Chananée, annoncent à leur père ce qui leur est advenu en Égypte, comment on les a pris pour des gens qui venaient espionner le roi ; ils avaient eu beau dire qu’ils étaient frères et qu’ils avaient laissé le onzième à la maison, on ne les avait pas crus ; ils avaient dû laisser Syméon chez le gouverneur jusqu’à ce que Benjamin arrivât pour attester la véracité de leurs dires ; et ils étaient d’avis que leur père, sans s’effrayer de rien, envoyât le jeune homme avec eux. Jacob n’approuva nullement la conduite de ses fils, et, comme la détention de Syméon lui était pénible, il trouvait insensé de lui adjoindre encore Benjamin. Roubel a beau supplier et offrir en échange ses propres fils, afin que, s’il arrivait malheur à Benjamin pendant le voyage, le vieillard les mit à mort : il ne se rend pas à leurs raisons. Dans cette cruelle perplexité, ils furent encore bouleversés davantage par la découverte de l’argent caché au fond des sacs de blé. Mais ce blé qu’ils avaient apporté vint à manquer, et la famine les pressant davantage, sous l’empire de la nécessité, Jacob se décida à envoyer Benjamin avec ses frères ; car il ne leur était pas possible de revenir en Égypte, s’ils partaient sans avoir exécuté leurs promesses ; et comme le

  1. Nous conservons, avec Naber, la leçon de la majorité des mss. (ὥσπερ οὐκ αὐτῶν), mais nous avouons ne pas bien comprendre la pointe.
  2. Gen., XLII, 29.