crie à la non-existence de l’inégalité sociale ; Charlotte Savary s’est attaquée au monde politique pendant que Thériault tape dru sur des travers d’ordre surtout clérical. Ils n’ont peut-être pas réussi également, mais leur tentative dans l’ensemble fait tout de même époque au Canada français.
Gabrielle Roy s’est imposée dès « Bonheur d’Occasion » (1945). Si on a pu reprocher à cette œuvre certaines incorrections de langue, on sera forcé d’admettre que Madame Roy, qui avait grandi dans une ambiance étrangère, est parvenue, depuis, à s’imposer comme l’un de nos meilleurs écrivains en langue française. Dans « La Petite Poule d’eau », elle ne le cède en rien à un Constantin-Weyer pour ses descriptions de la nature manitobaine ; elle y brosse un admirable tableau des mœurs et habitudes de vie d’une colonie canadienne-française, perdue là-bas et ignorée jusque là de la plupart des lecteurs. Quant à son troisième roman, « Alexandre Chênevert »,[1] il montre que Gabrielle Roy peut jouer sur toutes les cordes humaines. On a aujourd’hui un recul suffisant pour se rendre compte que le Prix Femina, elle ne le dût qu’à elle-même ; la sympathie que l’on
- ↑ Publié simultanément par Flammarion, à Paris, et Beauchemin, à Montréal, en février 1954.