la ville et la jeunesse tout entière, gagnée par le renouveau démocratique, faisait augurer au Canada le règne d’une véritable liberté d’expression. Mais il fallut que Laurier prît le pouvoir pour s’affirmer plus conservateur que ses adversaires et, dans la guerre des Boers, afficher une servilité et un colonialisme rendant des points à ceux du vieux routier impérialiste Macdonald qui, étant premier ministre, refusait d’impliquer d’avance le Canada dans toutes les aventures anglaises. Grâce au vaniteux Laurier, des Canadiens eurent l’immense honneur et l’immense privilège de se battre avec la faible Albion contre les redoutables peuples du Transvaal… Un monument à Québec rappelle ce fait glorieux à quiconque pourrait être tenté de l’oublier. Heureusement que, cette fois, rien dans nos lettres n’a signalé l’événement !
La tournure terre à terre que prit la politique après l’installation au pouvoir de Laurier, devenu l’idole de tout un peuple qu’il sacrifiait à sa soif de gloriole et d’adulation — « les Canadiens français n’ont pas d’opinions politiques, ils n’ont que des sentiments » dira-t-il — finit quand même par provoquer une heureuse réaction dans les lettres : la naissance d’un mouvement qui, même sans prolongements, mérite d’être signalé. Pour la première fois en terre française d’Amérique