verdict après avoir entendu les témoins, les voix intérieures qui sont celles des différents êtres qui nous habitent ; c’est la conjugaison de ces êtres qui recrée celui que nous affichons devant le monde et dont le comportement est si souvent déroutant, non seulement pour ce monde, mais pour nous-mêmes.
« Les Témoins » sont un roman métaphysique dans la meilleure acception que nous pouvons donner à ce terme, notre premier roman métaphysique. Cloutier aborde puissamment son sujet ; il commence par un développement d’une belle amplitude et on y sent le souffle d’une incontestable grandeur, qui fait oublier la marque peut-être trop sensible d’influences extérieures, en particulier celle de Kafka. On y retrouve l’atmosphère du « Procès » jusqu’à et y compris le grenier lui-même, dont il ne peut, nous semble-t-il, éviter l’évocation. Il y a aussi quelque chose de « L’Accident » d’Armand Hoog dans cette conscience de culpabilité intrinsèque de l’homme qui tenaille les témoins et les pousse à s’accuser.
Mais Cloutier manque d’endurance. Les deux premiers témoignages sont admirablement amenés et magnifiquement conduits ; on y sent une véritable puissance, celle de l’écrivain qui a quelque chose à dire ; mais les témoins qui suivent se li-