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LE ROMAN DE L'HOMME

des solutions incomplètes quand elles ne sont pas absurdes. Jean Cherteffe voit grand, mais sa vision ne dépasse pas l’homme, l’homme qui s’obstine à ne vouloir chercher son salut qu’en lui-même et qui rejette a priori tout appui extérieur. Cherteffe ne rencontre Dieu ni en lui ni hors de lui : son suicide devient alors le seul aboutissement logique à une vie qui, sur le plan strictement humain, s’avère un échec sans rémission.

« Évadé de la nuit » est le premier roman à poser, au Canada français, le problème de l’homme sous cet aspect. Langevin l’aborde de front, sans chercher à éviter les écueils. À ceux dont la Foi a toujours été sans faille, le problème de la condition humaine ne s’est sans doute jamais posé, puisque, pour eux, il est entièrement et irrévocablement résolu par la Révélation et l’assistance de la grâce. Le problème de la souffrance des êtres innocents, tel, par exemple, l’enfant de huit ans de « La Peste » de Camus, expirant dans les affres de tourments qui sont pour lui la somme de toutes les souffrances qu’un être humain puisse endurer, ne se pose pas au chrétien qui en trouve l’explication dans la sublime Communion des Saints, grâce à laquelle toute souffrance satisfait, avec celle du Christ, pour tous les péchés des hommes et contribue à apaiser le courroux divin ;