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LE ROMAN DE L'HOMME

Il serait intéressant de chercher dans quelle mesure ils ont influencé nos romanciers. On peut, par exemple, se demander si Berthelot Brunet ou André Béland les avaient lus quand le premier écrivait « Les Hypocrites » et le second « Orage sur mon corps », sorte de « Nausée » canadienne. Sans doute les personnages de Sartre sont-ils plus vastes, si je puis ainsi m’exprimer, que le petit détraqué d’« Orage sur mon corps ». Mais dans ce roman, si brouillon qu’on puisse le trouver, Béland pose néanmoins des problèmes ou plus exactement des aspects de problèmes qui existent indubitablement chez nous. Quant au Philippe de Brunet, c’est lui aussi une sorte de déséquilibré, un type qui peut certainement exister, mais seulement à l’état d’exception ; c’est l’homme tombé au dernier stade de la dégénérescence que l’auteur nous a situé dans une ambiance à la fois saisissante et dramatique. Ce touche-à-tout qu’était Brunet a prouvé, avec ce livre, qu’il avait aussi l’étoffe d’un romancier. On regrette que des romans comme ceux-là (je pense aussi à « Neuf jours de haine » de Richard) passent quasi inaperçus chez nous, alors que des conformistes, à la renommée souvent surfaite, continuent à les éclipser. « Les Hypocrites » renferment quelques-unes des pages les plus déchirantes de toute notre littérature ;