complexité organique et psychique du malade ; on palpe son délire pour pénétrer avec lui dans ces mondes où il n’y a plus rien de commun avec notre conception du réel quotidien. Les prières elles-mêmes suivent le mouvement et leurs murmures deviennent, pour le malade, occasions d’évasion vers d’autres univers, absolument subjectifs, mais qui sont, dirions-nous, d’une autre dimension : visions sonores et sans suite qu’il nous semble entrevoir et nous promènent dans une atmosphère sans points d’appui, qui n’a aucune commune mesure avec celle dans laquelle nous sommes accoutumés de vivre.
Toute cette analyse intérieure, Giroux la réussit avec une aisance qui confond ; il a su capter la maladie, lui donner une forme, en un mot, l’incarner pour nous la montrer sous son aspect le plus nu possible. Et il a réalisé, en même temps, un grand roman catholique, évitant les écueils si nombreux sur lesquels se tuent tant d’autres qui prennent pour le summum de l’art l’étalage des bondieuseries les plus stupides. Giroux est peut-être, avec Clément Lockquell, le seul romancier catholique au Canada français à qui l’on puisse donner pleinement et intégralement ce titre. Il ne l’est pas avec la fougue d’un Bernanos, même si, comme lui, il pourfend les « bien-pensants »,