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Que si quelqu’un n’était point convaincu de ces vérités, je lui citerai une vieille loi anglaise promulguée sous Charles, II ; loi dont le texte, chose peu banale, n’a jamais été abrogé.

Cette loi édictait « que les femmes de tout âge, de tout rang, de tout métier ou grade qui par le port du corset, trompent les sujets masculins de Sa Majesté et les induisent par ce moyen en mariage soient atteintes par les peines applicables à la sorcellerie, à la magie noire et autres crimes de ce genre, en vertu des lois existantes, et que leur mariage soit déclaré nul par suite de la condamnation. »

Comme on le voit, le Dr  Maréchal qui a rédigé contre le corset, un texte de loi que j’ai reproduit, a été un peu devancé dans ses idées de proscription. L’impuissance de la loi que je viens de citer consolera mon confrère de l’échec, de ses projets, car que vient faire l’hygiène et la médecine là où il n’est point question de santé ? Qu’importe à la femme sa santé ; ce qui l’intéresse, c’est plaire, plaire beaucoup, plaire longtemps. Hygiénistes et médecins perdent leur temps à proscrire le corset, l’homme seul en tant que mari ou amant pourra remédier à cet état de choses, je dirai plus loin comment, et encore n’est-ce là qu’une simple hypothèse de ma part, hypothèse dont je ne vois pas la réalisation dans un avenir prochain.

De tout ce qui précède, il m’apparaît bien résulter que je puis poser et résoudre ces deux questions — toutes conditions de costumes et de mœurs égales d’ailleurs — : la femme doit-elle porter un corset ? non. La femme portera-t-elle un corset ? oui.

J’ai, je crois, expliqué suffisamment ce paradoxe apparent seulement, car si les deux questions, semblent découler l’une de l’autre, les deux réponses résultent de considérations toutes différentes. J’ai tenu cependant à résumer tout le problème sous cette forme car elle m’apparaît devoir mieux frapper l’esprit du lecteur.

En résumé, le costume agit sur celui qui le porte et c’est pourquoi la tradition clairvoyante a établi un habit spécial à chaque sexe, à chaque âge, à chaque profession. Le costume développe et renforce les idées que sa forme suggère et parfois impose. Aussi n’est-ce pas sans logique que les féministes avisées et hardies ont souvent protesté contre la tyrannie de leurs vêtements et surtout contre celle des armatures si gracieuses qui les doublent et les soutiennent.