Page:Novalis - Les Disciples à Saïs, 1914, trad. Maeterlinck.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
12
LES DISCIPLES À SAÏS

être pensif se heurta à la difficulté d’expliquer les formes nées de ces océans et de ces forces informes. Il chercha à expliquer les choses par une sorte de réunion en imaginant d’abord un corpuscule formé et ferme qu’il conçut infiniment petit ; il crut pouvoir construire l’édifice monstrueux à l’aide de cette mer de poussière, mais non sans l’aide d’êtres intelligents et de forces attractives ou répulsives. Plus tôt encore, on trouve, à la place d’explications scientifiques, des légendes et des poèmes pleins de remarquables images. Les hommes, les dieux et les animaux travaillent en commun, et l’on entend décrire, de la façon la plus naturelle, la naissance de l’univers. Du moins, on y acquiert la certitude de son origine accidentelle et mécanique et cette représentation est significative aux yeux même de ceux qui méprisent les conceptions déréglées de l’imagination.

L’idée de traiter l’histoire de l’univers comme l’histoire de l’homme ; de ne trouver jamais que des relations et des événements humains, est une idée répandue partout et qui, dans les temps les plus divers, revient sans cesse sous de nouvelles images. Il semble que toujours elle ait eu plus que toute autre une influence merveilleuse et une force de persuasion très grande. Le caractère accidentel de la nature semble aussi se lier de lui-même à l’idée de la personnalité humaine et c’est ainsi qu’on le comprit plus aisément. C’est bien pour cela que la poésie fut l’instrument favori de l’ami de la nature ; et c’est dans les poèmes que l’esprit de celle-ci apparut