Page:Novalis - Les Disciples à Saïs, 1914, trad. Maeterlinck.djvu/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
188
FRAGMENTS

rature classique que les anciens mêmes n’avaient pas. En ce qui concerne la force, Gœthe suit de près les anciens ; mais il les dépasse de beaucoup en étendue. C’est d’ailleurs un mérite qui n’est pas le sien. Son Meister les suit de près, car n’est-ce pas un roman, simplement, sans épithètes, et cela n’est pas peu de chose en ces temps-ci ! Gœthe doit être et sera surpassé, mais seulement de la manière dont les anciens peuvent être surpassés : en force, en étendue, en profondeur et en diversité. Il ne sera pas surpassé comme artiste, ou s’il l’est, ce sera d’une manière peu notable, car sa force et son exactitude sont peut-être plus magistrales encore qu’on ne croit.

La musique vraiment visible, ce sont les arabesques, modèles, ornements, etc.

Le roman traite de la vie ; représente la vie. Le romancier ne serait qu’un mime par rapport au poète. Souvent il contient les événements d’une mascarade ; un événement masqué entre personnes masquées. Le roman comme tel ne contient pas de résultat déterminé ; il n’est pas l’image et le factum d’une proposition. Il est l’exécution, la réalisation visible d’une idée. Mais une idée ne peut pas être enclose dans une proposition. Une idée est une série infinie de propositions ; une irrationnellement grande, indéterminable, incommensurable série. — Est-ce que